Historique de l'art martial
Les deux kanji de taï jitsu se traduisent littéralement par « technique du corps » (soit par extrapolation ; « quand on est désarmé »). Selon la convention de la méthode de romanisation « Hepburn » consistant à attribuer à chaque lettre une valeur phonétique, on devrait d’ailleurs transcrire plus correctement ce nom en alphabet latin (romaji) ; par tai jutsu. Pour diverses raisons…, la correction n’a jamais été apportée, par contre les bons kanji sont utilisés.
Le Taï jitsu à l’époque féodale japonaise

Durant la période féodale du Japon qui dura plus de mille ans, l’art des bushis (guerriers) se nourrit des enseignements codifiés par les ryû (courant, style, école). Les premiers ryû naquirent vraisemblablement au 15e siècle, cependant ce ne fut qu’au 17e siècle que le nom générique de ju jitsu apparut fréquemment pour désigner ces ryû ; le tai jitsu comptait parmi les plus célèbres. Son origine n'est pas connue avec précision, mais il aurait été redécouvert et codifié autour du XVIIe siècle par un guerrier du nom de Nagao Kenmotsu.
Maître Roland Hernaez 9e dan, dans son livre « ju-jitsu la force millénaire » cite comme ouvrage de référence « bu-jutsu ryu joroko » (biographie des fondateurs de ryu), qui atteste de l’existence du taï jitsu ryû : méthode spécialisée pour le combat corps à corps et contre armes légères (sabre court, poignard). Son étude se faisait entre bushi revêtus de leur armure légère et armés d’un tanto.
Selon d’autres sources, le taï jitsu aurait était aussi appelé précédemment « koshi no mawari » dénommé ainsi car son fondateur portait une corde enroulée autour de la taille.

De nombreux experts attestent de l’existence, et de l’influence du taï jitsu : « Les techniques de combats primitives donnèrent naissance aux arts martiaux plus évolués, dans lesquels des techniques spéciales développent les mains, les pieds et la tête. Une combinaison de tout cela se trouve dans le taï jitsu… Le judo, l’aïkido, le karaté et les autres formes de combat descendent du taï jitsu, et chacune d’elles développent ses propres caractéristiques spéciales…
Les techniques pour prendre avantage d’une prise de mains appartiennent au taï jitsu originel et sont pour cette raison, non seulement la propriété du judo et de l’aïkido, mais tout aussi bien du karaté » - Extraits de « This is karate » par Masutatsu Oyama 10e dan de karate.
De même, Toshishiro Obata dans son ouvrage « Samouraï – aïki jutsu » (SEDIREP) cite les noms des deux frères Minamoto dont l’histoire attribue la création de l’aïki jutsu ; Yoshi Ie réputé comme archer, et Yoshimitsu comme expert en lance, sabre et taïjitsu.
Le Taï jitsu moderne

Historiquement le tai jitsu en France et en Europe, plonge ses racines au Japon, dans le dojo de Maître Minoru Mochizuki 10e dan fondateur du dojô yoseikan, situé à Shizuoka. Son rayonnement et sa pratique faisaient de lui, un des plus grands experts des arts martiaux. Il enseignait en parallèle de nombreux budo.

Un de ses élèves ; Jim Alcheik, à son retour en France en 1957 après un séjour de quatre années au Japon, créa à partir des enseignements du yoseikan ryu, une forme d’autodéfense sous l’appellation « tai jitsu ». En 1958, la Fédération Française d’Aïkido Taï jitsu et Kendo fut créée. Après sa mort accidentelle en 1962, son élève et ami Maître Roland Hernaez se sentit la responsabilité de continuer à développer le taï jitsu.

Après plusieurs séjours au Japon, notamment en 1972 chez Maître Minoru Mochizuki en compagnie de son frère Georges Hernaez et de Daniel Dubois, il structura dans les années 1970, grâce à sa formation d'Éducateur Sportif, une méthode progressive d’enseignement adapté à l’esprit européen.
Le taï jitsu « méthode française » est donc une discipline moderne issue des arts martiaux japonais, mais adaptée à la défense personnelle. Le taï jitsu continue à se développer en France ; plusieurs tendances se sont constituées. L’histoire humaine est pleine de soubresauts, et le tai jitsu ne fait pas exception pour de multiples raisons humaines, ou de politiques fédérales.
On peut retenir succinctement ces quelques dates :
1968 : création de l’Association Française de Taï Jitsu (AFTJ)
1972 : création de la Fédération Française de Taï jitsu (FFTJ)
1977 : entrée de la discipline au sein de la FFKAMA (premier art martial affinitaire à l’intégrer), et dissolution de la FFTJ.
1983 : Daniel Dubois créée son groupe au sein de la FFKAMA (il y a donc « deux » taï jitsu au sein de la FFKAMA)
1986 : les dirigeants de l’AFTJ (groupe suivant Roland Hernaez) décident de quitter la FFKAMA et se rapprochent de la Fédération Française de Judo et Disciplines Associées (FFJDA)
1988 :retour du groupe suivant Roland Hernaez (qui portait depuis 1985 le nom de nihon taï jitsu) au sein de la FFKAMA. Création de l’Association Française de Nihon Taï jitsu (AFNTJ)
1999 : le taï jitsu et le nihon taï jitsu sont intégrés parmi les styles de karate jutsu au sein de la FFKAMA
2000 : Daniel Dubois quitte la FFKAMA avec un groupe d’élèves et créée un style nommé taï jitsu dô
2013 le taï jitsu et le nihon taï jitsu regroupant prés de 7000 licenciés, s’engagent en concertation avec la FFKDA (anciennement FFKAMA) dans un processus de rapprochement administratif, et d’échanges techniques, compte tenu des liens historiques qui les unissent.
Sources : Mémoire 6ème DAN, Philippe Vervynck